Résidence : principal !

Avec la Covid-19, le statut d’artiste se retrouve fragilisé. La Ville de Strasbourg, le Centre Européen d’Actions Artistiques Contemporaines (CEAAC) et Horizome maintiennent des dispositifs qui permettent aux créateurs de poursuivre leur pratique dans des conditions favorables. 

Bon nombre d’institutions culturelles strasbourgeoises proposent aux artistes locaux et étrangers de nouveaux formats de travail, des rencontres, des échanges et des expériences. Selon leurs perceptions, intentions et idées, les plasticiens peuvent trouver la résidence qui les inspire et partage leurs engagements. Le programme de résidences internationales du CEAAC ouvre les frontières conduisant les artistes du Grand Est à Séoul, Stuttgart, Francfort, Budapest ou Prague et accueillant les candidats des villes partenaires. Ces échanges croisés offrent un tremplin dans la carrière artistique et la visibilité au sein et hors du pays.
Initié en 2001 par la Région Alsace, ce programme d’échanges artistiques avait pour vocation de soutenir les artistes en leur faisant bénéficier d’un accompagnement professionnel à l’étranger, leur permettant ainsi de se constituer un réseau. Cette initiative est à présent soutenue par la Région Grand Est, la Ville de Strasbourg et la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC Grand Est). Selon Élodie Gallina, chargée des relations internationales au CEAAC et responsable de la résidence, « l’objectif commun est de soutenir et faire rayonner la création artistique contemporaine de la région ».

Résidence d'artiste Séoul
Les artistes du Grand Est peuvent partir en résidence à Séoul, Stuttgart, Francfort, Budapest ou Prague.

D’une durée d’un à trois mois, les résidences permettent aux artistes de s’affranchir des contingences du quotidien pour mener leurs recherches et projets. Grâce à divers partenariats, les institutions culturelles proposent des conditions équivalentes à celles du CEAAC, incluant des bourses de production et de séjour, ainsi qu’une prise en charge du voyage. L’institution d’accueil fournit le logement, l’atelier, le soutien logistique et humain. L’artiste bénéficie également d’une importante visibilité, proposée dans le cadre de toutes les résidences et sous des formes différentes : rencontres avec des commissaires, ouvertures d’ateliers, expositions, conférences ou encore éditions. Élodie Gallina souligne que « l’artiste est libre de mener son projet comme il l’entend et susceptible de l’adapter en fonction des rencontres, des opportunités ou du contexte ». Condition essentielle pour postuler : l’artiste doit être né.e dans le Grand Est, y avoir étudié.e ou y résider au moment de sa candidature. 

Arielle Grasser atelier avec Horizome
Dans l'atelier d'Arielle Grasser, lors de sa résidence avec Horizome.

Regarder vers l’Horizome 

Fondé par une anthropologue, Barbara Morovich, et une artiste, Marguerite Bobey, Horizome se veut un observatoire critique et un laboratoire des transformations urbaines du quartier de Hautepierre. Suite à des enquêtes, l’association se concentre sur le pouvoir d’agir des habitant.e.s, le cadre de vie et l’espace urbain et collabore avec les acteurs associatifs et institutionnels du changement urbain. La transdisciplinarité, le croisement des outils et la rencontre d’acteurs et actrices venant de milieux différents sont les principaux concepts inhérents au projet et aux résidences artistiques.
Horizome réalise chaque année une résidence d’une durée de deux mois, entre juin et novembre. La durée peut cependant varier selon les cas : être plus concentrée pour celles et ceux qui viennent de l’étranger ou échelonnée sur plusieurs créneaux pour les artistes strasbourgeois.es. Cette année, le format va devenir hybride : les artistes seront invité.e.s par l’association en réponse aux demandes et aux besoins du quartier. Grégoire Zabé, co-référent de l’activation artistique, remarque pourtant qu’Horizome reste ouvert aux rencontres d’artistes intéressé.e.s par des actions in situ, ancrées sur un territoire, pour d’éventuelles collaborations futures. Arielle Grasser, dernière résidente en date, unit l’imaginaire et la rencontre dans sa pratique. Son projet touche des récits autour du quartier, les fantasmes et les univers des habitant.e.s. Pour elle, la résidence artistique menée par Horizome est adaptée à celles et ceux qui n’ont pas peur de ne pas savoir où ils vont, et à celles et ceux qui ont envie de rencontres comme de création. 

Zaï Mo, co-référent de la résidence, ajoute que l’artiste est libre dans ses choix, mais le travail est mené en collaboration et surtout concentré sur l’échange et l’expérience. Partager son œuvre pendant sa production, offrir au quartier sa pratique personnelle est un exercice compliqué, surtout dans le temps court que la résidence propose en ce moment. « Ça ne peut pas se passer comme prévu : c’est le point de départ », raconte Grégoire Zabé. Le projet change et évolue mais l’objectif principal est le processus de co-création et l’histoire de la rencontre.

Résidences croisées 

Strasbourg propose des résidences croisées depuis 2005. Un dispositif qui vise à inspirer les artistes de la ville à élargir leur pratique grâce à une rencontre avec une culture différente. Le CEAAC, la Haute école des arts du Rhin (HEAR), Apollonia et la DRAC contribuent au déroulement de la résidence à Strasbourg. La municipalité travaille avec trois villes : Stuttgart, Dresde et Gdansk, qui accueillent et accompagnent les artistes strasbourgeois.es.
La résidence dure de deux à trois mois, généralement à l’automne. Elle s’adresse aux artistes qui ont résidé, travaillé ou étudié à Strasbourg durant les trois dernières années et qui font partie du monde professionnel de l’art. Un projet présenté doit avoir des liens directs avec la ville partenaire et être adapté à son contexte. Francis Ramel, graphiste, est parti à Dresde pour un projet focalisé sur les caractères typographiques de l’ex-RDA. Pendant son séjour, il a eu accès à de nombreuses sources et archives et a bénéficié d’un atelier d’impression.
La restitution peut être faite sur place ou au retour, lors d’une exposition collective, sous forme d’une édition, de performance ou d’enregistrement. Il est également possible d’exposer le résultat plus tardivement : la Ville de Strasbourg reste ouverte au dialogue post-résidence. 

Par Evdokiia Bannikova