En attendant La Femme

C’est depuis leur tournée au Mexique que Sacha Got, membre fondateur de La Femme en compagnie de Marlon Magnée, nous donne des nouvelles du groupe français le plus excitant depuis une dizaine d’années. Au propre comme au figuré, c’est-à-dire aussi bien sur YouTube que sur… Pornhub. Ils seront à voir en vrai à Nancy et à Strasbourg courant janvier.  

La Femme
Paradigmes, le troisième album de La Femme, est également décliné en film. © JD Fanello

Racontez-nous vos trois dates au Mexique ?
On a fait deux dates à Mexico et une à Guadalajara. Franchement, on a eu un super accueil, le public mexicain nous adore. Les salles sont complètes, les gens sont à fond, ils viennent même avec des faux t-shirts. Ils nous attendent à la sortie de l’hôtel et à l’aéroport, un peu comme un groupe de rock des années 60. Cela ne nous arrive qu’ici. Ils nous reçoivent comme du pain béni.

Qu’est-ce qui fait que vous ayez cette stature là-bas ?
Contrairement en France, aux États-Unis ou ailleurs, le rock est un genre encore hyper important et super écouté. Chez nous, c’est le rap et l’électro qui constituent les grandes familles musicales tandis que les groupes de rock sont devenus des dinosaures. Au Mexique, il y a encore plein de jeunes avec des perfectos, des t-shirts des Ramones, et en plus ils adorent ce qui est français. Et nous, on coche ces deux cases.    

Vos prochaines dates, en 2022, vous emmèneront en Europe puis aux États-Unis, comment expliquez-vous cette capacité à vous exporter ?
Dès le début de La Femme, on a commencé à tourner aux États-Unis  sur des scènes underground alors que personne ne nous connaissait là-bas. On a nous-mêmes forcé notre destin parce qu’on n’a pas attendu qu’on nous y invite. On s’est rendu compte qu’il y avait un public pour ça et que les gens adoraient tout ce qui était exotique. Au contraire de ce qu’on nous disait en France, comme le fait qu’on doive chanter en anglais pour jouer à l’étranger, on s’est en fait rendu compte qu’en chantant en français, cela leur rappelait Serge Gainsbourg, Plastic Bertrand… Un des bons côtés de la mondialisation pour la musique, c’est que les gens écoutent de plus en plus de tout. On voit des groupes comme les Turcs d’Altın Gün qui arrivent à jouer partout à l’étranger, pareil pour Tinariwen. Pour les étrangers, je pense qu’on est un groupe exotique et les gens écoutent avant tout la musique au lieu des paroles. Tout comme nous lorsqu’on écoutait des groupes américains au collège alors qu’on ne comprenait rien. 

Dans votre actualité, votre troisième album Paradigmes s’est décliné en film, dans quel but ?
Quand on a commencé à vouloir faire les clips de cet album, on réfléchissait à un concept. Pour les morceaux Paradigme, on avait imaginé un générique d’une émission de télé façon années 1970 et pour Disconnexion, un plateau d’une émission de débats à la (Michel) Polac. On s’est dit qu’on allait regrouper ces clips dans un set-up pour des raisons pratiques et économiques en tournant dans un seul et même lieu. À partir de là, on s’est dit que l’émission de télé serait un bon moyen de regrouper tous nos clips dans un film, c’était comme une suite logique.

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La Femme sera en concert à L'Autre Canal à Nancy le 22 janvier et à La Laiterie à Strasbourg le 27 janvier 2022. © JF Julian

« JB de Born Bad, c’est un des personnages les plus braves du business en France » 

Dernier clip en date, celui de Divine Créature qui existe en deux versions : l’une sur YouTube et l’autre, non-censurée, sur Pornhub via le compte de LeoLulu, couple franco-allemand qui cartonne sur ce site porno homemade
Il se trouve que Lulu, l’homme de ce couple, est un ami d’enfance du frère de Marlon. Ils avaient déjà utilisé un de nos sons pour une de leurs vidéos et ça faisait un moment qu’ils souhaitaient qu’on fasse une collab’. Le texte de la chanson s’y prêtait bien.

Trois jours après sa mise en ligne, il y a davantage de vues chez eux que sur votre chaîne Youtube…
(Il se marre) De toute façon, cela fera toujours de la promo pour l’un comme pour l’autre. 

Born Bad Records qui édite vos albums en vinyle fête ses 15 ans, que représente ce label pour vous ?
Pour moi, JB de Born Bad (Jean-Baptiste Guillot surnommé JB Wizz, fondateur du label, ndlr), c’est un des personnages les plus braves du business en France. C’est un des rares qui tient sa baraque tout seul. On a découvert ce label quand on était adolescents, on écoutait les compiles qu’il sortait et ça nous a nourri et influencé. Cela a même aidé à la création du groupe, il était logique qu’on fasse une collaboration avec lui. Comme je dis, c’est un des seuls qui est intègre à 100%, qui prône le bon goût et qui va chercher la qualité avant de chercher des vues et le succès. C’est rare de nos jours, c’est vraiment quelqu’un d’exceptionnel. On sait que tout ce qu’il sort est fait avec passion, ça vient du cœur contrairement à d’autres gens de labels qui vont nous dire « Ah, j’adore ce que vous faites » et qui après vont nous avouer qu’ils adorent des trucs horribles. En fait, ils adorent juste ceux qui font des vues alors que lui se battra pour ses projets jusqu’au bout. Pour la culture et pour la musique. C’est exceptionnel de nos jours.  

 Quels sont vos groupes préférés de ce label ?
Il y a ce groupe du Bénin Star Féminine Band qui est cool. Sinon, on aime bien Cheveu et Nathan Roche, le chanteur du Villejuif Underground. 

Vous qui sillonnez le monde, y a-t-il un lieu qui vous inspire plus particulièrement pour composer ?
Pas spécialement. Il y a des pays qui m’inspirent plus que d’autres comme l’Espagne et le Mexique, par exemple. C’est marrant mais quand j’étais plus jeune, j’étais fasciné par l’Angleterre et les États-Unis. Maintenant, je suis plus inspiré par le sud comme la scène turque, la scène grecque et les musiques folkloriques espagnoles. On va d’ailleurs sortir prochainement un album en espagnol. 


En concert à L’Autre Canal à Nancy le 22 janvier et à La Laiterie à Strasbourg le 27 janvier. 


Par Fabrice Voné