Des images qui claquent
« En perpétuant cette iconographie du tatouage, j’essaye d’ériger le tatouage comme un art contemporain », dit-il. Sacré agenda. Il parle de « groove », de « beat » qui doivent se dégager d’une image pour frapper, happer celui qui regarde et l’attraper par le cou. Sinon, l’art finalement, à quoi bon ? « La brutalité pop » : donner du fond, un sens politique pour faire bouger les lignes. Impacter, le seul geste artistique qui vaille ? Probablement. Pour lui, l’image doit être visible et lisible. Répandre le venin et prendre le classicisme, l’élitisme et l’immobilisme par les cornes. Un leitmotiv qui l’a poussé à créer sa propre galerie avec son associé Cyrille Grimault : se déclinant en ligne mais aussi en physique avec des extraits de la proposition de Venomen présentés dans le nouveau salon de tatouage, Pour la vie, qu’il vient d’ouvrir rue Kageneck. Venomen (venom pour « venin », omen pour « présage ») défend cette vision et présente des artistes liés ou pas au milieu du tatouage mais qui font claquer les images : Meeloo (Christian Gfeller) et Anna Hellsgard (Bongoût, maison d’édition fondée à Strasbourg), Antoine Bernhart, Crez d’Adrenalink Tattoo à Venise… Le tout à des prix abordables. « Une galerie d’art pour fabriquer et montrer des choses, pour gagner de l’argent qui nous permettra de travailler avec des gens », affirme-t-il.
Pour fêter la création de la galerie, son retour à Strasbourg et l’ouverture de son atelier de tatouage « Pour la vie », Sacha Lehné présente une rétrospective de son travail au Faubourg 12 : peintures grand format, planches, tatouages flash et dessins… Un large espace lumineux qui laisse place à son imagerie : sorte de néo tribalisme old school qui se joue des codes du tatouage traditionnel. On y retrouve en effet les motifs classiques : têtes de mort, serpents, tigres, femmes, traits larges et couleurs sanguinolentes par centaines. Il sait qu’il ne cessera jamais d’apprendre : arriver à une plastique intemporelle demande du travail, beaucoup de travail. Mais de toute façon, c’est ce qu’il cherche dans la vie : « Faire des images jusqu’à ce que je crève, jamais m’arrêter de faire mon métier, répandre mon venin par le dessin, la peinture et le tatouage ; ça et de l’amour. » L’art, une manière de donner un sens à sa vie.
Atelier de tatouage « Pour la vie », Sacha Lehné
5, rue Kageneck à Strasbourg
Instagram : Sacha le Tigre
Venomen, la galerie
Exposition rétrospective du travail de Sacha Lehné, présenté par Venomen, jusqu’au 10 octobre 2021 au Faubourg 12, 12, rue du Faubourg de Pierre à Strasbourg
Par Cécile Becker
Photo Jésus s. Baptista