Durant le confinement, Zut espère vous avoir accompagné en ayant publié sur sa page Facebook trois playlists de circonstance. À l’heure du déconfinement, on n’oublie pas la musique, non non non ! Alors qu’est-ce qu’on écoute ? Des nouveautés pas piquées des hannetons.
Stéphane Milochevitch n’a pas attendu les consignes sanitaires pour porter le masque (du fou), sorte de pastiche de lui-même. C’est en solo et en Français que Thousand (ex-& Bramier, dans un registre americana de haute voltige) qu’il se dévoile depuis une petite poignée d’années et trois albums. Passé maître dans l’art du cadavre exquis, Milochevitch déconstruit des chansons ivres à toute blinde.
Il fonce en roue libre sur la ligne bleue des Vosges au volant d’un tacot rouillée comme sa voix évoquant le Bashung de Gaby. En compagnie d’Emma Broughton (chant) et de quelques acolytes (dont Olivier Marguerit) sur la banquette arrière, Cohen dans l’autoradio, il passe en vitesse / écriture automatique et fend l’air. Direction : le paradis, tout au bout du tunnel végétal.
Chez Talitres
Sésame, ouvre-toi sur le Moyen-Orient coloré, l’amour décomplexé et le fun acidulé. Les frérots Nakhleh tournent le dos au folk couleur sable de Laissez passer et font tourner la boule à facettes disco. Ils dansent sous les bombes d’une Syrie meurtrie, portant la fiesta en étendard et prônant la révolution culturelle comme idéal.
« J’irai cracher sur le patriarcat », semblent chanter en chœur Hasan et Rami sur beats bêtas et synthés old-school déversant des sons dignes des fêtes de mariage et des discothèques des années 1980 sur le plateau du Golan. TootArd : les Arabes du rétro-futur !
Chez Glitter Beat
Dans le brouhaha post-confinement, certains ont choisi de garder le silence (ça ne sera pas retenu contre eux), de nous susurrer des confidences, sans mots, uniquement via quelques impressions, fruits d’une longue introspection. Christophe Menassier ressemble à la maisonnette qui orne la pochette de son album : perdue dans un vaste paysage, elle ouvre en très grand ses fenêtres et observe, sent, hume des flocons de neige tombant sur un grand pin, un feu de camp, un chemin forestier embrumé.
Le sound-designer de luxe (sans la vraie vie), sur le rythme du battement cardiaque d’un individu marchant dans les calanques assaillies par les mouettes (pas très rieuses) et fouettées par le mistral, a composé la BO néo-classique d’un film imaginaire tournée en milieu naturel.
Si les quatre filles – dans le vent – de Melenas portent parfois de grosses paires de lunettes de soleil, ça n’est pas par snobisme ou mimétisme, mais parce qu’elles viennent de Pampelune, au Nord de l’Espagne, et qu’il y fait tous les jours soleil. Il faut écouter leurs mélodies indie radieuses pour s’en convaincre.
Quelque part entre Electrelane, Stereoloab, En attendant Ana (des collègues de label) et les productions madrilènes d’Elephant records, le quatuor chante en espagnol et à l’unisson sur guitares garage et claviers vintage. La pop au sommet… des Pyrénées !
Nous sommes très loin de la techno tapageuse et hyper-speed sur laquelle s’essoufflaient les danseurs de jumpstyle recrutés sur Internet par le collectif (LA)HORDE pour le spectacle To da Bone. La pièce chorégraphique Room vith a view, quelque peu perturbée par l’arrivée du virus, conviait le Ballet nationale de Marseille à se mouvoir sur scène, s’extraire de la pierre au cœur d’une carrière de marbre immaculé et se mettre en branle sur des vrombissements atmosphériques.
Les danseurs / sculptures se meuvent sur des sons triturés dans la chambre avec vue de Rone. Les beats paraissent lointains, puis envahissent l’espace minéral qui se façonne alors que dialoguent Alain Damasio et Aurélien Barrau. Tout est à inventer dans le monde d’après. Permettons-nous toutes les raverie.
Chez Infiné
rone-music.com
collectiflahorde.com
Par Emmanuel Dosda
À travers Le Lierre et l’Araignée, Grégoire Carlé décrit comment des gamins ont mis des grains de sable dans le rouage de l’occupation nazie à Strasbourg et ont contribué à faire basculer l’Histoire. Parmi grandes planches contemplatives et cases narratives grouille tout un bestiaire, nagent les anguilles et volent les rapaces, tandis que la mygale tisse sa toile.
Michel Cloup a marqué les années 90 hexagonales avec son projet Diabologum, groupe à (re)découvrir absolument pour la portée politique de sa musique. Avec le trio chaud-brûlant Despentes/Dalle/Casey, il ouvre pour Strasbourg Capitale Mondiale du Livre une lecture musicale dédiée aux auteurs·trices féministes. Café. Clope. Magnéto. Entretien avec un artiste qui n’a rien perdu de sa rage adolescente.
Ouverte depuis cinq ans, la galerie Malagacha met en avant des œuvres d’inspiration urbaine en plein cœur historique de Strasbourg. Autodidacte comme les artistes qu’il représente, son fondateur et directeur Damien Seliciato réussit à étendre de plus en plus son rayonnement.
Après presque 18 années passées dans les embruns iodés de Marseille, Émilie Girard quitte le musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée et remplace Paul Lang à la direction des Musées de Strasbourg. « Le monde de la conservation n’est pas si conservateur qu’on le pense », affirme-t-elle en se remontant les manches.
