Time for heroes

Aux côtés de Frédéric Lo, Peter Doherty s’est assagi et arrondi dans tous les sens du terme.
Sa rédemption l’amènera à Strasbourg début décembre. 

Frédéric Lo et Peter Doherty© Nicolas Despis
Frédéric Lo et Peter Doherty © Nicolas Despis

Free Pete. Début 2000, le slogan s’affichait sur un t-shirt sombre où l’on pouvait percevoir la bouille de l’enfant terrible des Libertines malgré des yeux barrés d’un ruban noir. Époque survoltée où le jeune homme défraye la chronique en alimentant les tabloïds sur fond de toxicomanie, du cambriolage de l’appart de Carl Barât, son acolyte aux sein des Libertines, et de sa relation tumultueuse avec Kate Moss. « What a waster, what a fucking waster ! («Quel bon à rien, quel putain de bon à rien !») », tournait à la manière d’un gyrophare dans les rades de Londres. À Shepherd’s Bush, on avait poussé jusqu’à Loftus Road, l’antre des Queens Park Rangers, pour déceler un semblant d’innocence renvoyant à son adolescence lorsqu’il réalisait des fanzines sur son club de coeur. En pure perte. L’aimable type préposé à la boutique déserte des Hoops nous ayant clairement indiqué la porte de sortie à l’évocation de Pete Doherty.

Forcément, celui qui s’illustra ensuite avec Babyshambles eut du mal à s’affranchir de sa propre caricature. Jusqu’à Grace/Wastelands, escapade en solo avec l’aide de Graham Coxon, comme un début de reconnexion vers la décence. Un duo de ballerines s’invite sur scène pour des concerts acoustiques parfois bluffants de luminosité. Progressivement, Pete redevient Peter (son prénom) et s’enracine de ce côté-ci de la Manche. On le croise dans les rues tortueuses du centre historique de Perpignan, du côté de Barcelone avant de le localiser à Melun. Un Brexit plus tard, il trouve son havre de paix au bord des falaises d’Étretat et au bras de Katia de Vidas, fille du producteur exécutif de Claude Lelouch. Un homme et une femme donc, auxquels se joint Frédéric Lo pour accélérer la rédemption artistique du personnage.

Par le passé, l’auteur-compositeur avait déjà remis Daniel Darc en selle avec Crèvecoeur (2004). C’est justement dans le cadre d’un album-hommage à l’ancien chanteur de Taxi Girl, décédé en 2013, que Lo contacte Doherty. Ce dernier découvre et reprend « Inutile et hors d’usage ». Comme une évidence et un préalable à une collaboration plus intense qui se matérialise avec le très classieux The Fantasy Life of Poetry and Crime, sorti au printemps. Un immense album pop d’où émerge la voix apaisée d’un dandy régénéré au brie et au camembert, ses deux nouvelles obsessions lactées. « Je le bois par pinte », affirme-t-il dans un entretien à The Guardian, à l’occasion de la sortie de son autobiographie A Likely Lad. La pasteurisation est prévue le 5 décembre à La Laiterie.


Peter Doherty & Frédéric Lo + guest
5 décembre à La Laiterie


Par Fabrice Voné