Le nom de votre compagnie est Monstre(s) : pourquoi ?
Ce nom vient de mon premier spectacle, Le Soir des monstres. J’aime l’idée qu’on ait une idée première assez claire de ce que c’est qu’un monstre, et que plus on essaye de le définir, plus il va nous échapper, devenir multiple. Cela symbolise mon travail : je pars d’archétypes, d’un imaginaire commun, pour progressivement me diriger vers des choses plus personnelles et plus complexes.
Votre travail pourrait se caractériser par la création sur scène d’images très fortes. Êtes-vous d’accord avec cela ?
Complètement ! Je travaille en images. Je les laisse vivre dans ma tête, je m’y balade, je dessine en permanence, et dès que j’essaye quelque chose, je mets tout de suite de la musique, un costume. J’essaye toujours d’être dans des images. Et je me suis rendu compte que plus une image m’émeut, plus elle va résonner chez les gens. Donc je cherche toujours mon émotion.
Que cherchez-vous à provoquer chez les spectateurs ? Le choc esthétique peut-il être le point de départ d’une réflexion ?
La sidération et le fait de ne pas comprendre ce qui se passe sur scène, ça c’est la magie, et c’est mon outil premier. C’est une façon d’être dans le sensible plutôt que dans le rationnel. Je cherche à ce que les gens quittent le réel, cela permet d’entrer vraiment en profondeur dans les histoires.
Cherchez-vous à transformer le réel ou à le déplacer ?
Les frontières entre réel et irréel, entre l’inanimé et l’animé, nous semblent claires mais elles sont discutables. Pour les médecins par exemple, la frontière entre mort et vivant n’est pas très nette. Ce qui m’intéresse c’est de travailler ces frontières. La mienne est complètement poreuse, et si elle est percée de partout, alors l’irréel peut faire irruption dans le réel, et inversement. Et ça devient magique.