Les artistes lyriques évoquent souvent une émotion particulière procurée par le chant…
C’est une forme d’exploration de soi. Il y a une vérité absolue lorsqu’on est au centre de la scène. C’est un acte de transcendance, d’évaporation de l’être. Je chante depuis toute petite : je ne traverse pas d’océans ou ne gravis pas de montagnes, mais j’explore sans cesse la matière de ma voix.
Une matière qu’il faut modeler pour ouvrir le champ/chant des possibles ?
Exactement, on peut la manipuler en agissant sur notre souffle. Il est nécessaire, et pas uniquement pour les chanteurs, d’apprendre à le maîtriser. Nous vivons actuellement dans une société qui ne sait pas respirer ! Nous devons nous calmer, sortir de la tourmente, alors qu’au contraire le tempo ne cesse de s’emballer.
Vous travaillez en ce moment sur la nouvelle production de l’Opéra national du Rhin : La Voix humaine, sur une musique de Francis Poulenc interprétée par l’Orchestre philharmonique de Strasbourg et avec une mise en scène de Katie Mitchell. Comment envisagez-vous ce seule en scène ?
J’ai eu l’occasion, récemment, de découvrir ce rôle de personnage frôlant la folie auprès d’Olivier Py et son projet La Voix humaine – Point d’orgue. Il n’y a pas de formule pour jouer cette femme blessée par la rupture car cette oeuvre est labyrinthique, c’est un univers à géométrie variable. Avec Katie Mitchell et sa vision moderne et novatrice, nous souhaitons nous éloigner de « l’hystérie féminine » décrite dans le texte de Cocteau de 1930. Heureusement, la condition et la vision des femmes n’est plus la même aujourd’hui…
L’atmosphère strasbourgeoise est-elle propice à l’accueil de la mélancolie et les tourments qui habitent cet opéra ?
Totalement ! C’est une ville magnifique, riche en théâtres et musées, où les gens font preuve d’une grande curiosité. Le contexte actuel est compliqué, mais plus que jamais l’âme a besoin d’une culture qui permet de ne pas uniformiser la pensée !
17 février à 18 h
Rencontre à la librairie Kléber
librairie-kleber.com
18 février → 14 mars
À L’Opéra de Strasbourg
et à La Filature de Mulhouse
operanationaldurhin.eu
Par Emmanuel Dosda