La Canopée : l'orée de la forêt

Place de Haguenau, l’ancienne Maison  du Bâtiment est en train d’opérer sa mue. Bientôt, une  végétation luxuriante viendra coiffer celle qui se nomme désormais La Canopée. Visite de chantier avec  les équipes de  KS  construction.

ZUT magazine a suivi la construction de La Canopée, anciennement la Maison du Bâtiment à Strasbourg. Photo : Henri Vogt

Cela fait plus de 10 ans que la Maison du Bâtiment, si familière des Strasbourgeois, semblait dépérir aux abords de l’autoroute. En 2008, un premier projet prévoyait la conversion de la tour de 13 étages en bureaux, commerces et logements. Entretemps, le promoteur immobilier Édifipierre a repensé le projet, écartant les bureaux pour le requalifier en immeuble résidentiel avec des logements étudiants pour les étages de 1 à 6, des logements sociaux de 7 à 9 et du haut de gamme de 10 à 14. L’architecte Francis Parent, de la société Archicub à Schiltigheim, a décidé de jouer sur la verticalité du bâtiment, tout en lui associant, en résonance directe avec le parc de la place de Haguenau, une forte présence de plantes via un parvis végétal et surtout d’une forêt qui viendra la surplomber. La Canopée, réalisée avec le concours de la société d’architectes-paysagistes Acte  2 Paysage, basée à Obernai, constituera un marqueur fort à l’entrée de la ville, offrant aussi sur elle une vue imprenable.

En cette fin du mois de juin, les équipes de KS  groupe sont lancées depuis quelques mois dans la délicate opération de désamiantage du bâtiment, et entament une phase essentielle  : la démolition structurelle de la partie haute de la tour, au niveau des 13e et 14e étages, afin d’accueillir une nouvelle charpente métallique qui permettra non seulement de créer des nouveaux logements, mais aussi de supporter la future forêt. La livraison est prévue en septembre 2019 pour les résidences étudiantes et à la fin de l’année pour les parties hautes. Christophe Choplin, chef de service de KS construction, nous sert de guide.

ZUT magazine a suivi la construction de La Canopée, anciennement la Maison du Bâtiment à Strasbourg. Photo : Henri Vogt

Les travaux ont débuté à la toute fin décembre 2017, les échafaudages montés en janvier, avec cette contrainte particulière  : le désamiantage nécessite le confinement des niveaux. Le chantier se décompose en trois phases  : curage, désamiantage et démolition des niveaux supérieurs. Christophe Choplin nous explique qu’après le curage de la totalité du bâtiment (les faux-plafonds, les moquettes, les cloisons légères non structurelles…), le désamiantage s’effectue à chaque fois sur trois niveaux, «  en fonction du rapport amiante qui a été transmis à KS construction et de tous les tests  » réalisés sur site. Les niveaux de 10 à 13 ont déjà été effectués, ainsi que ceux du 7 au 9. «  Là, nous entrons en zones 4, 5 et 6  », nous explique-t-il. Les niveaux déjà désamiantés sont déconfinés, avec les tout derniers petits éléments à curer  : des morceaux de réseaux et des habillages.

Les opérations de désamiantage s’effectuant dans des zones confinées, nous resterons à l’entrée du sas matériel, dans lequel les ouvriers se voient confier leur équipement obligatoire individuel – une combinaison, des lunettes, un masque et des gants  – dont une partie reste à usage unique. Ils intègrent ensuite le sas personnel avant d’entrer en zone, où ils effectuent une vacation d’une heure et demie. À l’issue, ils se douchent dans le sas personnel, se changent et sortent. Dès lors, ils prennent une pause d’une demi-heure, se rééquipent et recommencent. Ils recommencent ainsi entre 3 et 4 fois par jour, en fonction de la température extérieure.

Pour accéder aux étages supérieurs, le lift extérieur impressionne. On soupçonne le technicien en charge de nos déplacements de pouvoir accélérer la vitesse  : il s’en amuse, mais nous ménage avant de nous offrir une vue imprenable sur la ville et la cathédrale. Noémie Cahen, la chargée de communication de KS groupe, s’extasie avec une bien belle formule  : «  La voilà, la grande dame  !  » Nous partageons son enthousiasme…

ZUT magazine a suivi la construction de La Canopée, anciennement la Maison du Bâtiment à Strasbourg. Photo : Henri Vogt

Par le passé, le 13e étage correspondait à un local technique. Le programme prévoit sa transformation, avec la démolition «  structurelle  » de l’ancien plancher afin de poser une nouvelle charpente métallique de 80 tonnes. Laquelle va porter non seulement les quatre logements de standing, mais aussi une terrasse avec 1,20m de terre, en prévision de l’implantation de la forêt, la fameuse Canopée. Cette opération nécessitera la construction future de poteaux. En contrepartie, ceux existants mais indésirables ont déjà été déposés au profit des seules structures porteuses. Au final, l’usager gagne en confort, dans des espaces rendus plus vastes et lumineux.

Au sommet de la tour, la discussion porte sur la grue montée une dizaine de jours auparavant –  comparaison est faite celle d’en face pour le projet Plein Ciel, forcément «  moins  grande  » –, en prévision d’une démolition qu’il juge «  lourde  »  : elle concerne le mur qui entoure tout le 13e étage, qu’il s’agit de scier, découper et déposer au fur et à mesure. Les ouvriers s’activent selon une technique bien rodée  : «  On pique, on coupe et on lève  !  », s’amusent-ils derrière leurs pelleteuse et marteau-piqueur avant de s’accorder une courte pause. La pause photo, bien sûr… Christophe Choplin en profite pour nous indiquer les emplacements des jardins
d’hiver à l’arrière du bâtiment  : des ouvrages extérieurs qu’on vient rapporter sur la façade sous la forme de «  boîtes  », qu’il distingue des loggias à l’intérieur du bâtiment avec un voile en maçonnerie et une porte coulissante. Il nous renseigne également sur des parties humides qui résultent des orages impressionnants des semaines précédentes  : «  Nous étanchons le 12e étage  pour qu’il réceptionne les eaux de pluie, nous aspirons au fur et à mesure.  »

ZUT magazine a suivi la construction de La Canopée, anciennement la Maison du Bâtiment à Strasbourg. Photo : Henri Vogt

Un dernier coup d’œil sur la «  grande dame  », et nous voilà ré-embarqués dans le lift pour une redescente sur Terre après avoir tutoyé le ciel. Le bal des camions a débuté  : ils entrent rue Jacques Kablé pour une heure de «  retournement  » et du stockage, à la fois pour la charpente et le gros œuvre. Christophe rappelle que le projet contient aussi pour la partie basse des opérations de terrassement, avec la création de fondations et d’un niveau de sous-sol, qui nécessite la pose d’une dalle communiquant avec le sous-sol existant. Le but  ? La création d’un parking supplémentaire à destination des usagers des logements de standing, lesquels accèderont à leurs appartements par des halls et des ascenseurs distincts. Avant de partir, nous levons la tête. Le chantier a livré une partie de ses secrets. Depuis, chaque jour, nous constatons son évolution.


La Canopée
Place de Haguenau à Strasbourg


Par Emmanuel Abela
Photos Henri Vogt