Émilie Girard, nouvelle directrice des Musées de Strasbourg

Après presque 18 années passées dans les embruns iodés de Marseille, Émilie Girard quitte le musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée et remplace Paul Lang à la direction des Musées de Strasbourg. « Le monde de la conservation n’est pas si conservateur qu’on le pense », affirme-t-elle en se remontant les manches.

Portrait d'Emilie Girard. ©Christophe Urbain
Portrait d'Emilie Girard. ©Christophe Urbain

La directrice scientifique et des collections du Mucem a longtemps participé à « faire dialoguer des collections européennes avec des œuvres du monde entier » afin de « décentrer notre regard » occidental. Toujours, cette même question en tête : « Comment apporter des éclairages différents ? » Celle qui fut formée à l’École du Louvre poursuivra cette quête à Strasbourg. La directrice compte notamment ouvrir en grand les portes des musées à tous les publics : « L’institution muséale ne doit pas uniquement être un lieu où l’on vient voir des expositions. Il faut parvenir à produire une expérience physique, au-delà de la pensée intellectuelle. Il est important de proposer un contenu engageant et impliquant, par exemple en mettant le corps en jeu ! » Pour « On danse ? » en 2019 au Mucem, Émilie Girard, commissaire de l’expo, a imaginé la diffusion d’une boucle vidéo de six heures, projetée sur plusieurs écrans de tailles différentes, invitant le visiteur à picorer des images ou à absorber la totalité du mashup visuel, à s’assoir sur des modules, s’allonger sur une moelleuse moquette, gesticuler sur une balançoire lumineuse ou… danser au milieu d’une scéno pensée pour susciter le mouvement. 

Il faut que ça matche !

Autre cheval de bataille de la nouvelle Strasbourgeoise : l’écologie, « sujet essentiel auquel il faut sensibiliser le public ». Pour des expositions éco-conçues et recyclables, « il faut que ça matche entre le commissariat et les scénographes. On doit discuter entre les équipes. » Penser collégialement, avec l’ensemble des services. « À Strasbourg, nous avons une chance incroyable avec ce réseau de onze musées ! Je souhaite créer davantage de fluidité : la pluralité des collections permet de féconds dialogues à imaginer », dit-elle avec une « tendre pensée » pour le volet « arts et traditions populaires » particulièrement bien fourni dans notre ville. 

Collecte de désirs 

Son exposition rêvée concernerait tous les musées, avec un important et indispensable travail de coordination. Surtout qu’Émilie Girard associerait volontiers un artiste d’aujourd’hui au projet. Des noms ? La directrice n’ose pas se prononcer, préférant sonder ses nouveaux collègues. Ne pas faire cavalière en solo. Elle finira par lâcher : «Jeff Koons, pourquoi pas. C’est seulement un exemple, mais j’ai adoré travailler avec lui au Mucem, il est humainement très touchant et attentif, très loin de l’image de businessman qu’il s’est construite. » Et d’également citer Ilaria Turba, photographe franco-italienne qui a constitué une « collection de désirs » après avoir recueilli des témoignages auprès d’habitantes et habitants des quartiers nord marseillais. « Elle explore la matière. Rend les émotions sensibles. » 


Expositions en cours dans les musées strasbourgeois

Jusqu’au 19.05
« Strasbourg 1560-1600. Le Renouveau des Arts », au musée de l’Œuvre Notre-Dame 

25.04  03.11
« Julie Doucet. Une ­rétrospection », au musée Tomi-­Ungerer – Centre international de ­l’illustration

25.04  15.07
« La constellation Gustave Doré », à la Galerie Heitz 

Jusqu’au 04.08
« Être ou paraître », Jeanne Bischoff, au MAMCS

musee.strasbourg.eu


Par Emmanuel Dosda
Photo Christophe Urbain