ZUT V'la Dosda ! Chez Olivier Chapelet, directeur du TAPS

« Normalement, le GPS vous y emmènera sans problème, mais si besoin, n’hésitez pas à me passer un petit de coup de fil… enfin s’il y a du réseau. » Où allons-nous ? Dans la pampa du 57, chez Olivier Chapelet, du Théâtre actuel et public de Strasbourg. Un chalet au décor rustique où le directeur du TAPS se ressource et travaille, loin de l’agitation strasbourgeoise. Entretien avec vue sur les épicéas.

Nous avons pris quelques virages bien serrés et profité du paysage sylvestre avant – enfin – d’arriver à Hommert, Moselle. Olivier nous attend sur le palier de sa mignonne maisonnette et nous guide directement vers sa terrasse : « Ça m’a soufflé de découvrir hêtres, chênes, sapins et boulots ! C’était un rêve d’enfant – qui a grandi dans le béton et le bitume de la région parisienne – de vivre au beau milieu de la verdure de la campagne. »

Olivier Chapelet, directeur du TAPS © Christophe Urbain

Poulet basquaise pour tout le monde !

À la tête du TAPS depuis 2005, il s’installe d’abord dans une maison d’Hellert, « avec vue sur le rocher du Dabo ». Cadre bucolique, terrain cabossé qu’il mettait sept heures à tondre, assis sur un terrible engin pétaradant pourvu de poignées de mobylette. « Ce premier contact avec la nature a été comme un objet transitionnel vers mon chalet, acquis en 2008. » Il vit en famille dans le centre-ville strasbourgeois, quai Finkmatt, mais tient à garder cette chaleureuse habitation où le néo-Alsacien (amoureux fou du Grand Est) passe ses week-ends, ses vacances, trouve l’inspiration ou organise des dîners façon team building pastoral avec son équipe d’une dizaine de personnes. La dernière fois, c’était poulet basquaise pour tout le monde.

Olivier Chapelet, directeur du TAPS © Christophe Urbain

D’Alcatel à Corneille

Il fait trop chaud pour allumer le poêle « fabriqué à une quinzaine de kilomètres à peine d’ici ». Dans la moiteur de l’été indien, nous entamons un petit tour du propriétaire. Il faut faire preuve de souplesse, voire de dextérité pour grimper à l’étage, par une étroite « échellescalier » casse-binette. Ce que nous prenons pour une couchette d’enfant est un héritage familial : le lit marqueté de la grand-mère d’Olivier. Posé contre cette relique ancestrale, un étui de guitare. « Je suis venu au théâtre par la chanson », affirme-t-il. « Mes textes étaient nuls, alors j’ai eu envie de m’exprimer à travers les écrits des autres. » Tchekhov, Racine, Sénèque, Ibsen ou ses fidèles Thierry Simon et Pierre Kretz. « Je me suis accompli dans l’art dramatique ! » Pourtant, le destin d’Olivier n’était pas tout tracé, étant à l’origine davantage porté sur les « comptes de résultat » que sur Oncle Vania. « J’ai suivi le cursus paternel en m’inscrivant dans une école de commerce. Lorsque j’ai travaillé pour Alcatel, on m’a envoyé au Japon. Arrivé à l’aéroport de Narita, je me suis mis à pleurer. Ça a été un déclencheur. » Il a vécu les dix-huit mois passés à Tokyo comme « un choc culturel énorme », une parfaite « phase de transition vers le théâtre », nous dit-il en désignant une poupée kokeshi en bois peint et l’effigie d’un comédien de théâtre nō habillé en femme, le visage peint en blanc – offerte par ses collègues à l’issue de sa mission nipponne. Il a beaucoup lu au Japon, de manière compulsive : des essais sur la scène et textes d’œuvres, classiques ou contemporaines.

© Christophe Urbain

Le plus beau métier du monde 

De retour en France, il devient administrateur du centre dramatique de Poitiers, officie au Théâtre des Deux-Rives de Rouen, incarne des personnages en jouant quelques rôles et se lance dans la mise en scène de textes d’auteurs qu’il admire : « L’écriture, c’est le plus beau métier du monde, c’est faire vagabonder le lecteur. » Dans sa bibliothèque, près du solide coffre transformé en vaisselier, rien que du théâtre : Notes et contre-notes d’Eugène Ionesco, Comme je le pense de Jean-Louis Barrault, Ubu de Jarry, Godot de Beckett, Molière, Lagarce, Vilar, Jouvet, Vitez… Sur sa table basse, un livre d’entretiens avec Jon Fosse qu’il apprécie tout particulièrement. Il y retourne régulièrement : Écrire, c’est écouter.


Prochains spectacles d’Olivier Chapelet au TAPS :

06.11 —> 07.11
Ich wàrt uf de Théo, au TAPS Scala
Texte de Pierre Kretz, mise en scène Olivier Chapelet (Compagnie OC&CO), avec Francis Freyburger

21.01 —> 25.01
Cortex / Diptyque, au TAPS Laiterie
Texte de Mélie Néel et Catherine Monin, mise en scène Olivier Chapelet, avec Pauline Leurent et Logan Person (artistes associés)

28.04 —> 30.04
Mes parents, au TAPS Scala
Texte de Mohamed El Khatib, mise en scène Gaëlle Axelbrun et Olivier Chapelet, avec élèves du Conservatoire à rayonnement régional de Strasbourg, scénographieet musique d’élèves de la HEAR

//taps.strasbourg.eu


Par Emmanuel Dosda
Photos Christophe Urbain