La Disparue du cinéma, premier roman de Laurence Mouillet
Vendredi 19 mai 1995, 18h57, exactement. À cet instant précis débute La Disparue du cinéma, basé sur de bien réels faits. Un meurtre prémédité, féminicide organisé, dans un ciné. Pas de Truman (Capote) show ici, mais un roman, le premier de Laurence Mouillet.
Toutes celles et ceux qui – et c’est mon cas – étudiaient à Strasbourg au moment des faits relatés dans La Disparue du cinémase rappellent de ce sordide fait divers. Avec ce livre, écrit trente ans après le drame, Laurence Mouillet réalise son rêve de romancière « légitime » tout en se mettant à l’épreuve de l’introspection douloureuse dans ses souvenirs flous. Une enquête journalistique détaillée ? Non, un haletant polar poétique. Très personnel, surtout, car Laurence (Claire dans le livre) était au premier rang, face à l’écran (de fumée), lors de la projo de ce mauvais film « écoeurant », aux actes « suffoquant de tristesse ». Sandra, caissière, enceinte de neuf mois, s’éclipse sans laisser de traces, se précipitant « vers le néant », tombant « vers un trou noir sans fin ». Les indices s’accumulent et les regards suspicieux se tournent vers Lionel. Le projectionniste, père de l’enfant « à naître » est décrit comme « froid, distant », stoïque « observateur implacable du rayonnement atomique de sa propre existence tout autour de lui ». Dans un contexte nineties déjà « préhistorique », avec des répondeurs-enregistreurs ou wagons fumeurs, le trop bien nommé Zombie des Cranberries en BO, Laurence / Claire fait face à l’abject, lorsque « tous les registres de l’horreur sont convoqués » en ce temps où « l’imaginaire morbide est infini ».
Pour échapper à l’épouvante, Laurence 1995 prend la fuite, durant des nuits à rêver (et réparer) et un voyage mythique dans les Cyclades, sur l’île de Délos qui « signifie “clair, visible” ». Laurence 2025, devenue « clairvoyante », nous confie avoir ressentie un « besoin d’évasion, en Grèce, lieu de naissance de la tragédie ». Une (pas si enchantée) parenthèse solitaire, mais solaire, avant le procès, le grand déballage. L’écrivaine décrit ses vingt ans, cette période incarnée par Claire qui perçoit le monde via la jeunesse de « ses sensations », enivrée par le goût du chlore lorsque son corps plonge dans la piscine, puis bascule dans le « concret » de l’affaire, la découverte du corps de la victime et celui « de son enfant contenu dans cette enveloppe fermée ». Sa tête brûle. Stupeur, tremblements. « L’air et l’eau ne forment plus qu’un élément » où elle perd ses repères.
La Disparue du cinéma de Laurence Mouillet, Édité par Médiapop
Par Emmanuel Dosda Photo Pascal Bastien
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