Emilie Simon, miraculeuse Ladybug

Il y a vingt ans, le public faisait la connaissance d’une multi-instrumentiste à l’esthétique du son à nul autre pareil. Aujourd’hui, la chanteuse-auteure-compositrice-arrangeuse-productrice-couteau-suisse Emilie Simon nous offre ES, une édition rework de son premier album, sans nostalgie aucune.

Emilie Simon © Arno Paul

Vous dites que ES n’était pas vraiment prévu. Comment est-il né ?

Je voulais faire quelque chose pour les vingt ans de l’album, mais je ne savais pas sous quelle forme. Je ne voyais pas l’intérêt de proposer des remix, ni de sortir une édition anniversaire… Je cherchais quelque chose qui aurait un vrai intérêt artistique. Alors j’ai eu cette idée de reprendre « Désert » en l’adaptant à ma production actuelle. C’était très agréable à faire, drôle, ludique, j’ai essayé avec un deuxième, et de fil en aiguille j’ai fait tout l’album ! C’est l’opportunité de faire un travail de miroir, entre ma première pierre et là où j’en suis désormais. Travailler sur l’évolution de mon son, mon approche, ma voix… Une façon de se resituer par rapport à mon art. Et comme j’écoute peu mes albums, je suis partie du souvenir de ces titres, et dans un certain sens, je me suis retrouvée moi-même, mon énergie, ma base. Pour moi qui aime sortir de ma zone de confort, je vois un peu ça comme un retour aux sources, qui prend en considération le fait qu’un artiste doit évoluer, sinon il meurt.

Il y a vingt ans, on vous considérait comme avant-gardiste ; désormais votre style musical fait partie de notre quotidien. Quel regard portez-vous là-dessus ?

Je trouve que les productions d’aujourd’hui sont plus intéressantes qu’à mon époque, elles sont tellement plus créatives aussi. Il y a plus de gens audacieux, plus de femmes, plus de textes en français… À l’époque il n’y avait pas de bandes-son, ni les synthés virtuels dont on dispose aujourd’hui, il fallait être très créatif, utiliser des subterfuges. Certes, ça forçait à expérimenter, mais désormais, on a accès à tellement de choses, les possibilités sont immenses ! Je me sens plus en phase avec la musique qui se fait aujourd’hui, à l’époque je me sentais un peu à part, parce que je ne rentrais dans aucune case… Je trouve qu’il y a plus de liberté à présent. Et en même temps, tout est plus minimal… Prenez la pochette : on est passé de plein de coccinelles à une seule, on est devenu efficace, rapide – ça correspond au monde qui nous entoure. Et finalement, je suis plutôt en phase avec ça.

Interview réalisée à L’Autre Canal, vendredi 20 octobre 2023, dans le cadre du Nancy Jazz Pulsations.


19.01 / 20 h
Concert — Emilie Simon
Au PréO, à Oberhausbergen
le-preo.fr


Par Aurélie Vautrin
Photo Arno Paul