Comment chacun des styles musicaux des têtes d’affiche va compléter ceux des autres artistes ?
Comme c’est la première édition, la direction artistique musicale est articulée autour de notre organisation. Merci Beaucoup existe depuis 2016, on a organisé beaucoup d’événements d’ampleurs différentes et on veut marquer le coup pour le festival avec deux scènes. Cela a un impact sur sa programmation et sa durée, assez longue — deux jours —, influence le choix de sa direction artistique musicale. Il y a une cohérence progressive dans notre programme. Merci Beaucoup a des influences house, disco et new wave. On a choisi Deetron parce qu’il est un artiste house. Romain Fx est un artiste dans la tendance avec ses influences italodisco et japonaise.
On a voulu encourager la proximité européenne et faire attention à la planète en invitant des artistes qui ne venaient pas de trop loin. Nos trois artistes internationaux viennent soit en voiture, soit en train, pour que ce soit plus clean.
On a repris l’objectif d’un événement qu’on avait organisé en 2020, abrogé par le Covid. On va faire un panorama des artistes strasbourgeois qui correspondent à notre direction artistique musicale : de la scène musicale électronique et actuelle strasbourgeoise. C’est pour cela qu’on fait participer le collectif Menthe poivrée, le collectif Ordinaire, et Vigo, le fondateur du Longevity Festival. On a aussi invité Zak, que le public ne connaît pas et qui fait de la musique live. Le dimanche, la scène extérieure sera plongée dans une ambiance full house.
Les différentes animations et activités que vous proposez, dont l’oeuvre d’art participative, visent-elles à fédérer les festivaliers autour de la découverte d’arts et d’œuvres d’art plus innovants ?
Oui, en effet. Un des piliers de l’association a toujours été sa dimension plus transversale. Grâce à la vente de sérigraphie et à la présence des artistes sur place, le public pourra échanger avec eux et les membres du collectif. Les gens pourront aussi collaborer entre eux grâce à l’œuvre participative, qui est une pixel war [concept venu de la plateforme Reddit, ndlr]. Ils auront à disposition une toile de trois mètres sur deux sur laquelle ils pourront dessiner grâce à des gommettes carrées.
Nous avons une vraie volonté d’échanger avec le public. Comme on le dit souvent, on aime faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux. C’est pour cela que le festival a pour but de découvrir de nouveaux artistes, en étant ludique. La musique est un socle très important que les autres arts complètent. On ne voulait pas que les gens fassent le tour du festival en dix minutes et partent parce qu’il n’y a plus rien à faire. Ils doivent avoir du choix, donc on a créé un mini-village.
Dans une période un peu troublée comme celle d’aujourd’hui, est-ce toujours aussi important d’organiser des événements fédérateurs autour de la musique ?
Oui, c’est nécessaire. Le Covid a montré que les gens ont besoin de ce genre d’événements pour se retrouver. Ils n’ont plus l’habitude de sortir le soir, parce que c’est trop cher ou qu’ils ne se sentent pas en sécurité en boîte de nuit, selon des études récentes. Les plateformes de streaming les engagent aussi à rester chez eux. Le monde de la nuit change au profit de structures qui organisent des événements plus intimistes. En participant à la création d’événements comme le Merci Beaucoup Festival, on fait sortir les gens. On veut attirer le plus de public possible : les places sont gratuites pour les enfants et on offre une boisson gratuite aux étudiants sur présentation de leur carte étudiante.
Les collectifs comme Merci Beaucoup sont primordiaux : face à la facilité de regarder les séries depuis chez soi, on fait force de proposition pour engager les gens à passer de chouettes moments à l’extérieur. Il était important pour nous que le festival soit une safe place : on a engagé l’association AMA (Ask Me Anything) pour la prévention anti-drogues. On tenait beaucoup à se défaire du cliché de la rave d’il y a 20-30 ans, où la sécurité du public n’était pas assurée.
Le quartier de la Coop a longtemps été un no man’s land. Récemment, des apéritifs musicaux sont organisés par un certain Lucas dans son studio de musique. Est-ce qu’on peut considérer qu’il y a un nouveau vivier d’artistes dans ce quartier ?
Il y a de plus en plus d’initiatives culturelles et artistiques dans cette zone, donc oui, c’est un vrai vivier d’artistes. Innervision, fondé depuis plus de dix ans, est son point central. Son directeur, Luc Tharin, a proposé d’accueillir le festival dans les locaux des Studios du Rhin. Il y a un véritable renouveau artistique dans ce quartier : deux studios musicaux se trouvent juste à côté du festival, celui de Benjamin Auberger et celui de Ouai Stéphane. Le studio Space Drive de Lucas Litzler est aussi à proximité. C’est une véritable zone d’art!
D’ailleurs, un autre des objectifs du festival est de créer une synergie avec les acteurs qui se trouvent autour. On veut faire participer des artistes des environs. On aurait pu organiser le festival au Jardin des Deux Rives. Mais on a préféré profiter de la confiance et de la bienveillance d’Innervision, avec qui on avait déjà organisé un événement en octobre dernier. On a la même volonté de participer au développement de cette zone assez excentrée de Strasbourg.