Jardin de Marthe,
ferme bio et impliquée

Reportage au Jardin de Marthe (à la Robertsau depuis les années 50 !), tenu de mains de maîtres par David et Laetitia Hornecker : des légumes et fruits bio, un magasin de vente directe, un point de vente au centre-ville (La Nouvelle Douane) et des possibilités de livraison avec le service Marmelade. Premier souci : la qualité des produits.

Préparation des légumes au Jardin de Marthe, ferme urbaine et bio installée à La Robertsau. Photo : Jésus s. Baptista.

C’est lendemain de tempête, ce lundi de février, à l’entrée de la Robertsau. Une poignée de clients piaffe devant les portes du petit magasin de vente en direct de la ferme. Exceptionnellement, les portes sont restées closes ce matin, le temps de déblayer les dégâts dans les serres, dans les champs et le verger des 5 hectares alentours.

David et Laetitia Hornecker, frère et sœur, sont à la tête de cette exploitation agricole familiale, installée à La Robertsau depuis les années 50. Laetitia me reçoit dans le bureau de la maison qu’habite son frère, à deux pas du magasin. Son emploi du temps du jour tient plus de celui de la cheffe d’entreprise que de la fermière aux champs. Elle doit faire vite, les livraisons n’attendent pas. Alors vite, elle me raconte l’histoire du Jardin de Marthe (sa grand-mère) transformé en 2017 en ferme 100% bio, sous l’impulsion de la nouvelle génération. « Dans les années 80, on était encore une centaine de maraîchers à La Robertsau, le vrai jardin de Strasbourg ; aujourd’hui, nous ne sommes plus que deux ! On aimerait devenir propriétaires de nos terres, mais nous sommes toujours locataires de la Ville, avec un bail rural. Heureusement, nous sommes protégés par la Ceinture Verte, car en 2008, sans le soutien des élus du quartier et des clients, nous aurions sans doute été expropriés », regrette Laetitia.

À proximité

Visiter une ferme à cette saison n’a rien de très bucolique, c’est la période de préparation des plantations, auxquelles s’attellent 3 maraîchers. « Avec l’exploitation agricole, le magasin de vente et un atelier de conditionnement de légumes à pot-au-feu pour la grande distribution, nous avons réussi à pérenniser 9 emplois en CDI, épaulés de 6 saisonniers. »

Au fil des saisons, ce sont 50 à 60 légumes qui sont produits sur place, ainsi que des fruits issus des 300 arbres du verger. Les autres produits du magasin proviennent à 40% de fournisseurs bio, et dès que possible, locaux, pour proposer une gamme complète, qui va des œufs aux jus de fruits, en passant par les agrumes, si c’est la saison. Le magasin est un prolongement de l’exploitation, qui permet d’écouler la majeure partie de la production.

Photo : Jésus s. Baptista

Le Jardin de Marthe dispose aussi d’une seconde vitrine, en ville, puisqu’il approvisionne le rayon primeurs de La Nouvelle Douane, le magasin de producteurs. La clientèle se recrute à proximité, mais pas seulement. « Des gens qui travaillent au Wacken, de Neudorf, de la Meinau, du centre-ville font chaque semaine leurs courses ici », explique Laetitia. Un rapide sondage parmi les clients de la boutique le confirme : on vient chercher ici du bio et du local. « En faisant ses courses ici, on ne s’éparpille pas, on ne se pose pas de questions, on a du choix, de la qualité et un bon rapport qualité prix ! »

Et avec son ouverture 6 jours sur 7 et son amplitude horaire de 9h à 19h, tout le monde y trouve son compte. « Depuis 2 ans, on sent qu’il se passe quelque chose à Strasbourg », se réjouit Laetitia, écologiste dans l’âme. « Les gens ont pris conscience de l’importance de ce qu’ils mettent dans leur assiette, ils s’approvisionnent local et de saison, réduisent leurs emballages, compostent… » Ici, on propose d’ailleurs des sacs en tissu pour faire ses courses, des bacs pour composter et déposer ses biodéchets et il « brade » ses paniers de légumes sur l’application Too Good To Go dans une optique de zéro déchet. Une exemplarité qui trouve aussi un prolongement avec l’accueil des scolaires pour sensibiliser les plus jeunes aux vertus des circuits courts, ou lors de journées portes ouvertes à la découverte d’une ferme urbaine.

« Les gens ont pris conscience de l’importance de ce qu’ils mettent dans leur assiette, ils s’approvisionnent local et de saison, réduisent leurs emballages, compostent… »

Mais pour que Strasbourg devienne une vraie ville nourricière, il reste du chemin à parcourir. « Toute la difficulté, c’est de libérer des terrains pour l’agriculture. Aujourd’hui, les jeunes qui veulent s’installer se heurtent au problème de la terre et des investissements de démarrage. Je suis avec intérêt certaines régions qui ont de bonnes idées ; par exemple des coopératives bio, pour mutualiser certains coûts et bonnes pratiques. »

Les citadins ont tout à gagner de cette agriculture urbaine : plus de champs et de verdure pour le plaisir des yeux, de la biodiversité pour le plaisir de revoir des papillons, des abeilles et des oiseaux, des légumes zéro kilomètre pour ne pas aggraver la facture environnementale. D’ailleurs, avec les projets à venir : un magasin plus grand et un système de livraison de légumes à domicile (et à vélo !), avec la jeune entreprise locale Marmelade, les légumes bio pourraient bien retrouver toute leur place dans nos assiettes et celle des restaurateurs du coin.

Le Jardin de Marthe
9, chemin Goeb à Strasbourg

_ Spécial confinement, horaires d’ouverture :
Les consignes de sécurité sont expliquées sur leur page Facebook.
Lun. | 12h – 18h
Mar. – Ven. | 10h – 18h
Sam. | 9h – 17h
_ On peut aussi commander sur leur boutique en ligne et retirer ses produits dans leur cour (le jour même si la commande a été passée avant 12h, le lendemain si elle a été passée après 12h)
_ Ou passer par le service Marmelade qui propose aussi de nombreux produits de petits producteurs et vous livre chez vous, à vélo (attention néanmoins, il y a de l’attente).


Par Corrine Maix
Photos Jésus s. Baptista