La patronne revient nous voir. « Voilà des petites choses en entrée », annonce-t-elle en déposant plusieurs bols sur la table : lentilles beluga, chou-fleur petits pois, noisettes du Piémont, ciboulette, fromage blanc… Je me demande quelle est la spécialité du resto qui semble tout neuf. À priori, beaucoup de choses locales. On mange local. Locavores nous sommes. Jean-François nous apprend que la patronne travaillait chez Hermès, « elle fait partie de ces personnes qui ont le courage de changer de vie », commente-t-il. La voilà qui revient vers nous, avec d’autres plats : « céréales de chez moi, tomates taboulé… » C’est quoi l’idée du lieu ici, je demande ? « Y a pas d’idée, s’exclame la patronne dans un grand sourire. On mange bien, tout ce qu’on trouve au marché, on cherche et puis on cuisine, voilà ! Je n’aime pas l’idée de spécialité, non. Je trouve un chou-fleur, je cuisine le chou-fleur, voilà ! » Oui d’accord, mais il y a une attitude, j’insiste… Elle l’admet « Oui, c’est une maison, une cuisine de femme, locale et de saison. Du bon produit, du bien fait. On a ouvert il y a quatre mois. » La patronne s’appelle Ayse. Singulier prénom. Ayse Wilhelm. Elle est Kurde. J’aime les Kurdes, ce peuple de 60 millions d’habitants sans terre, cette nation sans pays. Jérôme Forgiarini – qui a googelisé avant de venir – nous apprend que le café Surtout est un fastfood avec des produits locaux, mais où l’on mange dans des assiettes, avec des couverts et des verres, pas de gobelets en plastique, zéro déchets… Comme toujours, c’est la rédaction de Zut qui a choisi le lieu. Depuis peu, c’est elle aussi qui fixe le thème de la discussion. Et comme elle fait bien les choses, pour le coup c’est même le lieu qui nous invite à parler du sujet choisi : la RSE. Traduction : la responsabilité sociétale des entreprises ou encore la responsabilité sociale et environnementale.
Jérôme, qui a soigneusement préparé la rencontre, nous avoue avoir bachoté un peu le sujet avant de venir. « La RSE, finalement, c’est que des grosses théories. La question c’est comment tu la vis en fait, au jour le jour. C’est du développement durable, avec les trois axes : économique, social, environnemental. » Je suis impressionné par le défilé des plats. Ce n’est que l’entrée ? Eh oui ! C’est bon et copieux. Comme la RSE. Subtil et complexe. Jérôme poursuit son raisonnement de chef d’entreprise responsable : « Il y a toutes ces choses que tu fais déjà mais sans les nommer : recycler, trier, te préoccuper du bien-être des salariés, accompagner les gens, se poser des questions… Et soudain, tu apprends que c’est de la RSE ! Alors tu te dis, on ne communiquait pas dessus. » La RSE affaire de pratiques, mais aussi outil de communication. « On est complétement dans la société actuelle : tout ce que tu fais il faut que tu le valorises ! Or le nombre de fois où on a fait des trucs sans rien en dire… »