Un processus de création long et entier
Lorsque Delphine rejoint le projet en septembre 2020, son regard extérieur permet au collectif de se remettre en question : « C’était du fun du fun du fun, il y avait tout un tas d’envies qui s’accumulaient, sans prise de décision, et des votes pour à peu près tout. Il a fallu faire beaucoup de réunions et des points spécifiques pour faire des choix. En bref : combiner le fun à la structure. » Depuis, ils ont défini des pôles avec, chaque fois, un responsable : costume, « mise en corps », musique, décor, etc. « Le responsable maîtrise sa partie, explique ses contraintes et ses choix, on accepte, sauf veto. En fait, la base de tout c’est la confiance », analyse Théo. Trouver des consensus, mission impossible ? Et bien oui.
Au fil des mois, le processus de décision s’est affiné : tout prend beaucoup plus de temps mais il est important pour eux que chacun participe aux choix et les comprenne. De fait, il y aura toujours des désaccords mais si les choix sont argumentés et font sens, la décision est actée. Pour avoir assisté à plusieurs répétitions, un sujet récurrent a préoccupé le groupe presque dès le début : trouver un nom. Il y aura eu des discussions, des propositions, des tentatives toutes avortées et puis un jour, paf, le nom La Flopée est apparu et a fini par séduire tout le monde. Parce que le nom évoque le collectif, quelque chose qui grandit et prend de l’ampleur, même la sonorité du mot raconte la surprise. Voilà, ça a fait mouche. « On a aussi appris à accepter de ne pas pouvoir tout faire, de ne pas avoir la maîtrise complète, qu’il faut en passer par les erreurs et incompréhensions, accepter que tout prend du temps, et surtout le temps de se connaître », confie Laura.
En résidence en juillet 2021 à L’Autre Canal à Nancy (qui co-produit la création avec le festival Summerlied), l’histoire a littéralement commencé à prendre forme : les éléments de décor ont bien avancé, la partie musicale est maîtrisée, les déplacements pensés… Pour la première présentation publique devant une vingtaine de professionnels, quelque chose a changé : le collectif a pris confiance et tout se tient. La narration et la scénographie servent la musique et vice-versa. « L’idée principale de la narration, c’est qu’on cherche tous notre place, notre place au soleil », explique Jérôme. Comme une mise en abîme du collectif. « Ça se matérialise dans le décor construit comme une île de vacances. » Delphine complète : « En apparence, c’est un monde où tout va bien, avec un soleil artificiel – une boule à facettes –, mais où tout peut basculer. Au fil du spectacle, on ne sait plus très bien dans quel monde on est. » Faire ensemble mais dans l’idée de partage : une scène centrale autour duquel le public peut tourner et se déplacer à sa guise. Une « fête ring ». La boucle est bouclée.
La Flopée, le 4 mars au Molodoï, grande fête à partir de 19h.
Par Cécile Becker
Photos Christophe Urbain